Basildon, petite ville industrielle, bétonnée et lugubre, se trouve dans le comté d'Essex, à l'est de Londres. Là, à une réunion des «»Boys Brigade«», une sorte de mouvement scout, Vince Clarke et Andrew Fletcher se rencontrent et, tout de suite, s'entendent très bien. S'intéressant aux mouvements musicaux du moment, ils décident de s'acheter des instruments : Vince se paya une guitare et Andy une basse. Et, en 1977, ils forment le duo "No Romance In China". Régulièrement, ils jouent au Van Gogh Club. Ils y rencontrent, un jour, Martin Gore, qui joue de la guitare dans un autre groupe, "Norman And The Worms". Une solide amitié se crée entre lui et Andy, et se laisse convaincre de les rejoindre. Le trio prend alors le nom de "Composition Of Sound". Ils donnèrent leur premier concert au Scamps. De plus en plus, ils s'intéressaient à ce nouvel instrument à la mode, le synthétiseur, et pouvaient même se rendre compte des ses capacités en assistant aux concerts que donnaient d'autres groupes lors des samedis soirs "Spécial Groupes Electroniques" au Croc's.
Vince Clarke, chanteur et clavier, n'apprécie que très peu les performances de scène et préfère le travail en studio. Ils décidèrent de rechercher un nouveau membre qui le remplacerait au micro. Ils proposent la place à David Gahan, emballés par ses capacités vocales en l'entendant chanter "Heroes" de David Bowie dans un local de répétition. Il accepta.
Le groupe abandonne alors les guitares pour uniquement des synthétiseurs et prend définitivement le nom de Depeche Mode. Ce nom provient d'abord d'une de leurs nombreuses lectures, le magazine français de mode, mais traduirait aussi, pour eux, l'accélération des tendances qui s'éclipsent l'une l'autre, en quelques semaines... Au Croc's, une nouvelle nuit "Spécial Groupes Electroniques" leur permit de rencontrer DJ Stevo, leader du label "Some Bizzare", à la recherche de nouveaux noms pour sa compilation. Ils se mettent d'accord pour qu'apparaisse sur le "Some Bizzare Album", qui sortira en 1980, un de leur titre, "Photographic". Cet album fera date car, aux côtés de Depeche Mode, y seront révélés également O.M.D., The The ou encore Blancmange.
En décembre 1980, au Bridge House, un club de l'East London, ils font la première partie de Fad Gadget. Il font connaissance du fondateur du label indépendant "Mute Records", Daniel Miller, qui leur propose de travailler avec lui. La légende veut que la poignée de main échangée ce soir là sera leur unique contrat. Le fruit de cette collaboration sera le premier single "Dreaming Of Me", sorti en février 1981. Et même s'il se classa à la 57ème position dans le charts anglais, Martin et Fletch n'étaient pas encore prêts à renoncer à leur jobs. Les tournées devaient être refusées et se contenter des apparitions TV. Il fallu attendre le deuxième single, "New Life" en juin 1981, classé 11ème, pour voir les choses commencer à changer. Mais le meilleur restait à venir lorsque "Just Can't Get Enough" sortit en septembre 1981 et se classa 8ème des ventes en Angleterre. Tous s'accordait à dire que les choses allaient pour le mieux et qu'il était temps de quitter leurs jobs habituels et d'envisager le suite de la carrière de Depeche Mode avec sérieux. Ils trouvaient ainsi le temps de produire leur premier album, "Speak And Spell", qui sortit en octobre 1981, et intégrait les charts anglais à la 10ème place.
Mais, pour Vince, les choses n'étaient pas aussi évidentes,
et trouva que la pression du public, des médias, des fans, en tant que leader et auteur-compositeur, était devenue bien trop forte. Aussi, il ne surprit personne lorsqu'il annonça, le 12 décembre 1981, qu'il en avait assez et qu'il rendait son tablier ! Il retrouvera une ancienne amie, Alison "Alf" Moyet, qui ramait depuis des mois avec son groupe "The Little Roosters", et fondera "Yazoo". Clarke tiendra 18 mois, avant de partir à nouveau vers d'autres horizons, pour créer, avec Eric Radcliffe, "The Assembly". Mais depuis 1985, il joue dans le duo "Erasure" qu'il a fondé avec le chanteur Andy Bell.
C'est Martin Gore qui, pendant ce temps, dut prendre en charge l'écriture des chansons de Depeche Mode, sous le mince prétexte qu'il avait écrit 2 morceaux du premier album, et, avec Daniel Miller, de s'investir complètement dans la technique et ainsi combler l'absence de Clarke. Pari gagné : "See You" qui sort en janvier 1982, se classe 6ème dans les charts. suivront 2 autres singles, "The Meaning Of Love", en avril 1982, qui se classa 12ème, puis le fameux "Leave In silence" en août 1982, qui se classa 18ème dans les charts anglais. A noter que celui-ci sera le premier single portant la référence Bong dans le catalogue "Mute Records". Finalement, comme pour certifier à ceux qui doutaient que Depeche Mode pouvait exister sans Vince Clarke, le second album du groupe sortit en septembre 1982, s'intitulait "A Broken Frame" et se classa 8ème.
La petite annonce que Depeche Mode passa dans le Melody Maker pour recruter un nouveau membre disait à peu près ceci : " Groupe avec renom recherche clavier - Moins de 21 ans, impératif. ". Alan Wilder en affichait gaillardement 22 lorsqu'il se présenta à l'audition des candidats, mais "omis" de le préciser.
Il avoua quelque années plus tard que sa situation financière était telle qu'il aurait accepter le premier job qui se présenterait, même s'il devait mentir pour l'obtenir ! Son interprétation de "New Life" fut concluant et il intégra bientôt l'équipe pour la tournée "See You Tour". Mais c'est seulement lorsque le single "Get The Balance Right" sortit en janvier 1983, marquant un tournant dans le style de Depeche Mode et imprimant du même coup la musique moderne de son empreinte "pop-industrielle", qu'Alan fut considéré comme un membre à part entière du groupe et put, outre ce premier morceau, participer au travail de studio.
Le temps du renouveau était donc arrivé ! Mais Martin Gore trouve la vie ennuyeuse et cherche dans l'écriture le remède à la morosité. Ses chansons sont de plus en plus engagées pour ne ressembler que très peu aux chansonnettes d'avant. "Everything Counts", qui sort en juillet 1983 en prenant la 6ème place des charts, en est l'illustration, et annonce la sortie du 3ème album, "Construction Time Again", en août 1983 à la 6ème place en Angleterre. En sera également extrait, en septembre 1983, "Love In Itself", qui se classera en 21ème position. Alan signera lui aussi 2 morceaux de ce LP, "Two Minute Warning" et "The Landscape Is Changing", preuves, s'ils en aient, que cet album étaient véritablement le premier à unir les actions de chacun des membres du groupe.
Martin progressait dans son oeuvre. L'arrivée d'Alan Wilder était assurément un catalyseur dans les domaines techniques, mais il n'en demeurait pas moins que Gore avait besoin de changements ! Il alla s'établir à Berlin, où les douaniers, voyant sa tenue vestimentaire apparemment féminine, lui demandèrent s'il préférait aller dans les locaux des hommes ou des femmes pour être fouillé ! La scène musicale allemande était riche et innovante et ne manqua pas d'influencer Martin. Absolument de son époque, éclectique et en mouvance, "People Are People" sort en mars 1984 et se classe à la 4ème place des charts. Semblant confirmer des tendances SM, "Master And Servant" sort six mois plus tard, en août 1984 et prend la 9ème place du Top Ten anglais. Le quatrième album de Depeche Mode, "Some Great Reward", envahit véritablement le monde en septembre 1984, car non content de se classer 5ème et d'être sacré Album de l'Année en Angleterre, d'investir l'europe entière et les radios libres françaises par ses 2 premiers hits, c'est au tour des Etats-Unis de découvrir enfin le phénomène DM. "Blasphemous Rumours", qui sortit en octobre 1984 semble chagriner quelque peu la censure, alors que "Master And Servant" n'y était pas parvenu ! Mais rien n'y fait et le titre se classe à la 16ème place. Ici encore, Alan écrivit une des chansons de l'album, "If You Want".
Pourtant, avec Martin en Allemagne et les autres en Angleterre, l'unité du groupe fait défaut et il semblait alors que Depeche Mode se lassait de lui-même. Un single sortit pourtant en avril 1985, "Shake The Disease", puis un autre en septembre 1985, "It's Called A Heart". Ils n'atteignirent tous deux que la 18ème place, confirmant le peu d'enthousiasme général. D'ailleurs, aucun album n'était annoncé. Au contraire, en octobre 1985, sortit "The Singles 81 > 85", un compilation de leurs singles connus jusqu'à lors, comprenant en plus les 3 titres qui n'apparaissaient sur aucun album, "Get The Balance Right", "Shake The Disease", et "It's Called A Heart". Au Etats-Unis, elle prit le titre "Catching Up With Depeche Mode", tandis qu'elle se classait 6ème dans les charts anglais. Succès final ? Malgré leur apparition au "Bob Geldov's Live Aid", pour tous le monde, cela représentait la fin. En fait, ce ne fut que la fin d'une période.
Le ton du renouveau est donné en février 1986, lorsque sort "Stripped". Mais les fans s'étonnent, tous ne reconnaissent pas leurs idoles dans ce tempo lancinant et sensuel qui diffère tant des singles précédents. Il n'obtiendra qu'une 15ème place dans les charts. Aux Etats-Unis, les faces sont "inversées" par "Sire Records" au grand dam du groupe, et c'est "But Not Tonight" qui est distribué en face A. "Black Celebration" est le cinquième album studio du groupe. Il sort en mars 1986 et atteint une étonnante 3ème place. Affichant une ambiance sombre et mélancolique, c'est un album intransigeant, marquant une nette progression dans la recherche musicale, dans un style qui en déconcerta plus d'un et qui en envoûta beaucoup d'autres, et que l'on retrouvait lors des concerts, devenus depuis de réels événements émotionnels, tant en Europe qu'aux Etats-Unis. En avril 1986, "A Question Of Lust" est extrait, mais n'atteint que la 28ème position. Puis "A Question Of Time" sortit en août 1986. Son tempo entraînant et sa mélodie simple et efficace le firent accéder à la 17ème place des charts anglais. En dépit de la richesse sonore que recelait "Black Celebration", cet album a été l'un des plus difficiles à écrire et à composer d'une part, et à enregistrer d'autre part tellement l'idée que se faisait Martin du rendu final était précise et immuable.
Un nouveau single, "Strangelove", arrive en avril 1987. Il ne sera classé qu'à la 16ème place des charts malgré qu'il ait été décliné en 14 remixes au Etats-Unis. Puis vint "Never Let Me Down Again" en août 1987. Sa 22ème place dans les charts anglais illustrera ses faibles ventes en tant que single, mais reste le véritable hymne de l'album "Music For The Masses" qui sort en septembre 1987. Il est mondialement Disque de Platine mais doit se contenter de la 10ème position en Angleterre, accusés qu'ils étaient, d'être arrogants dans la dénomination de leur LP, alors que seul l'humour en était l'origine... A nouveau, le style de l'album diffère des réalisations précédentes, privilégiant davantage la guitare à l'avant plan. Un dernier single en sera extrait en décembre 1987, "Behind The Wheel", mais ne fera que la 21ème place des classements anglais malgré qu'il fut remixé en multiples versions par des artistes tels que The Beatmasters ou Shep Pettibone. Il fera en revanche un bon score aux Etats-Unis du fait de la présence en face B du titre de Robert W. Troup "Route 66". A noter que "Little 15" sera également produit en simple aux USA, accompagné de la Sonate n 14 "Au Clair de Lune" de L. Van Beethoven, interprété par Alan Wilder.
En parallèle à sa carrière au sein de Depeche Mode, Martin enregistre un album solo "Couterfeit E.P", reprenant des succès des 70's, qui sortira en juin 1989. De son côté, Alan construit son projet personnel "Recoil", et produit en 1988, deux minis LP "1+2" puis "Hydrology", regroupant des morceaux instrumentaux.
Le succès du groupe est devenu immense aux Etats-Unis, à la dimension de leurs concerts ! Et c'est le cent-unième et dernier de leur tournée mondiale, au Rose Bowl de Pasadena, Californie, qui fur enregistré en vidéo le 18 juin 1988, devant près de 70 000 spectateurs, par D. A. Pennebaker, pour donner le double album live "101". Des morceaux en seront extraits, avec à leurs têtes, "Everything Counts", sorti en février 1989, 22ème dans les charts. L'album sortira un mois plus tard, en mars 1989, et atteindra la 5ème place en Angleterre.
En août 1989, un nouveau single, "Personal Jesus". Ce titre, emprunté à l'intimité de Priscilla et Elvis Presley, est d'inspiration blues et dominé par la guitare. Il se classe, en Angleterre, à la 13ème place tandis qu'aux Etats-Unis, il est le premier Disque d'Or du groupe et l'une des plus fortes ventes de singles de l'histoire américaine. "Enjoy The Silence" sort en février 1990 et atteint le 6ème place des charts anglais. Ce hit international, reconnu comme la marque de fabrique de Depeche Mode, sera décliné en plusieurs remixes, dont le "Final Quad Mix", qui dure près de 15 minutes. L'album "Violator" suivra bientôt en mars 1990, et se classa à la 2nde place des charts anglais et la 7ème aux Etats-Unis. Ils signèrent près de 17 000 copies de l'album à la Los Angeles Tower Records lors d'une séance d'autographe. A New-York, les 40 000 places pour le concert au Giant Stadium ont été vendues en 8 heures et, à Los Angeles, les 48 000 places du concert au Dodger Stadium ont toutes été achetées une heure après leur mise en vente. Un autre single, "Policy Of Truth", sortira en mai 1990 et se classera 16ème, puis "World In My Eyes", en septembre 1990, qui prendra la 17ème place des charts.
Mais tous ne va pas si bien au sein du groupe après le "World Violation Tour". Les querelles internes font que tous se séparent sans savoir si ils travailleront encore ensemble. Dave s'installe à nouveau à Los Angeles, tandis que les autres préfèrent s'occuper de leur famille. Mais au cours de l'année 1992, alors que Gahan ne se sent pas capable de faire un autre album "dance", Martin lui fait parvenir des démos pour le prochain album, des chansons que Dave décrira comme "électrisantes, bluesy, planantes, majestueuses, magnifiques" ! Non seulement ces morceaux correspondront au feeling et au rêve de Gahan mais ils les auront rassemblé à nouveau autour de la même cause. Il sait que ces chansons vont repousser plus loin les limites de la musique de Depeche Mode, comme il le désirait depuis longtemps. C'est en février 1993 que sort "I Feel You", pour prendre la 8ème place des charts anglais. Inspiré du meilleur blues, il annonce la nouvelle dimension musicale explorée par le groupe, davantage orientée vers le rock, influencée par la soul music ou le gospel, et prenant la forme d'un nouvel album, "Songs Of Faith And Devotion", qui sort en mars 1993. Après trois années d'attente, il est accueilli partout dans le monde à l'image de l'Angleterre et des Etats-Unis, où il prend, dès sa sortie, la 1ère place des classements. Un nouvel extrait sera produit en avril 1993, "Walking In My Shoes", se classant 14ème. En septembre 1993, "Condemnation" sort à la 9ème place, accompagné de "Death's Door", chanson écrite par Martin Gore pour la bande originale du film de Wim Wenders, "Until The End Of The World". Une version live de l'album sortira en décembre 1993, classé à la 46ème position, reprenant l'enchaînement des morceaux de la version studio. Un quatrième et dernier titre est extrait en janvier 1994, "In Your Room", pour ce classer à la 8ème place des charts.
L'épuisement mental qui a suivi la tournée mondiale "Devotional Tour" du groupe, d'une durée de quatorze mois et un itinéraire de cent cinquante-six concerts, a gravement affecté l'équilibre de Martin Gore et de Andy Fletcher, poussant même Alan Wilder à annoncer, le 1er juin 1995, son départ, après treize ans de bons et loyaux services, justifiant d'ailleurs son geste par une croissante mésentente au sein du groupe et dans le travail. Et pendant que Martin et Andy se remettent chez eux, à Londres, David, lui, vit des heures sombres en Californie : le 17 août 1995, il est admis au Cedars-Sinai Medical Center de Beverly Hills après une tentative de suicide, et sera soigné pour "lacérations des poignets par une lame de rasoir".
Les premières sessions d'enregistrement débutent au mois d'avril 1996, aux Westside Studios de Londres, où ils enregistre quelques parties instrumentales avec un orchestre à cordes, pour se poursuivre, via Los Angeles, aux Electric Lady Studios de New York, construis par Jimi Hendrix peu avant sa mort. C'est Tim "Bomb The Bass" Simenon, fan de la première heure et qualifié affectueusement par Martin de "nouvelle âme soeur", qui en prend la direction. Il s'est assuré la collaboration de plusieurs musiciens de talents : Jaki Liebezeit, bassiste du groupe expérimental allemand "Can", Doug Wimbish, ancien bassiste de "Living Colour", du batteur de "Soul II Soul", et B.J. Cole, virtuose de la pedal steel guitare.
Mais le coeur n'y est plus vraiment. A tel point que les trois membres du groupe étaient proches de rompre leur association. "Je vais être franc", dira plus tard Martin Gore, "Après cette période de New York, j'ai effectivement pesé le pour et le contre de ma participation à ce groupe. J'ai vraiment pensé que, peut être, il était l'heure de changer mon fusil d'épaule. J'avais besoin de temps pour y réfléchir." Tous s'accorderont alors quelques vacances. Mais Gahan continue de jouer avec sa vie : il est retrouvé inanimé le 28 mai 1996 à 1h15 du matin, dans une chambre du Sunset Marquis Hotel, Beverly Hills, Los Angeles. Les médecins concluent à une overdose due à l'absorption d'un mélange de d'héroïne et de cocaïne. A 8h30, à sa sortie du Cedars-Sinai Medical Center, il est arrêté pour détention et usage de stupéfiant. Il sera relâché à 12h30, moyennant une caution de 10 000$. L'accusation est levée le 30 juillet 1996 en regard de son engagement dans un traitement de désintoxication. Il reprend la route de Londres, pour se réfugier auprès de ses deux compagnons. La confiance finit par revenir : Martin, après mûre réflexion, reste. Et, en septembre, les sessions d'enregistrement reprennent aux mythiques studios d'Abbey Road. David fait le ménage dans sa carrière et dans sa vie, et voit ses efforts récompensés par la joie de pouvoir apporter sa pleine contribution au groupe ainsi revitalisé, tout en découvrant qu'après les cours de chant qu'il a dû reprendre auprès d'Evelyn Halus suite à ses excès, sa voix est plus puissante que jamais : "Je suis très heureux d'être clean et sobre", confira-t-il, "j'ai retrouvé ma vie." Le fruit de cet extraordinaire renouveau psychique est présenté en février 1997, sur le premier single "Barrel Of A Gun". Création à la fois mélancolique, ténébreuse et triomphante, elle s'accompagne d'un clip tourné par le fidèle Anton Corbijn à Londres et à Marrakech, au Maroc. Un second single, "It's No Good", apparaît ensuite en mars 1997. En avril 1997, soit 4 ans après "Songs Of Faith And Devotion", sort un album que nul n'osait espérer : "Ultra", le bien nommé puisque de l'aveu même des personnes concernées, il s'agit de l'album suprême du groupe, et représente la musique la plus intransigeante et la plus intraitable jamais produite par Depeche Mode. Il pourrait être sous-titré "chants de passion et de persévérance". Martin Gore confiera : "Il n'y a pas vraiment de concept ni de thème central, mais une grande partie des morceaux parle du destin. Cet album évoque sans doute moins la religion que nos réalisations passées, mais il s'imprègne quand même d'une certaine spiritualité.", et Andy Fletcher de continuer : "Les événements nous ont sérieusement ébranlés, mais ils ont également fait ressortir ce qu'il y avait de meilleur en nous. Pour beaucoup de gens, nous étions morts et enterrés. En réalité, nous sommes mieux armés qu'auparavant." Aux Etats-Unis, l'album se classe n°5 du Billboard. Il est sacré Disque de Platine en Espagne, en Suède, en Allemagne, en France et en Angleterre, tandis qu'il est Disque d'Or en Italie, à Hong Kong et au Canada. Décidant de ne pas entamer de tournée à sa suite, le groupe accorda plus de 250 interviews et participa à divers shows télévisés en Europe, comme "Nulle Part Ailleurs", le 21 avril 1997, sur Canal + France, et aux Etats-Unis, comme "The Tonight Show with Jay Leno", le 15 mai 1997. Ils donnèrent également une interview spéciale diffusée sur Internet en direct de la "House Of Blues". Depeche Mode inaugura d'ailleurs son propre site officiel, www.depechemode.com. Deux soirées promotionnelles furent également organisées, une à l'Adrenaline Village à Battersea, le 10 avril 1997, et l'autre au Shrine Expo Hall à Los Angeles, le 16 mai 1997, où le groupe interpréta les mêmes morceaux, les 4 singles qui seront extraits d'"Ultra", ainsi que "Never Let Me Down Again".
"Home" est le troisième single et sort en juin 1997. C'est Martin Gore qui en est l'interprète poignant.
La vidéo, quant à elle, a été tournée à Los Angeles en deux jours, et, pour la première fois depuis 1986, ce n'est pas Anton Corbijn qui l'a réalisé, mais l'anglais Steve Green de "Rogue Films", plus connu comme réalisateur de spots publicitaires. Il travaille également avec le chef opérateur Peter Thwaite. La vidéo a été montée et mixée a Londres où ont été également réalisés les effets spéciaux avec la technologie Flame. La sortie du quatrième single, "Useless", est réalisée en octobre 1997, et la vidéo tournée au Pays de Galles par Anton Corbijn. Comme toujours pour Depeche Mode, de multiples artistes de la scène internationale ont contribué aux remixes, comme CJ Bolland, Barry Adamson, Kruder & Dorfmeister ou encore Cosmic Blues.
Dans le courant du mois de mars 1998, le groupe entrait à nouveau en studio pour y enregistrer plusieurs morceaux, toujours sous la direction de Tim Simenon. Une séance photo a eu lieu à San Francisco du 5 au 7 juillet, pour illustrer le programme de la tournée. Un nouveau single intitulé "Only When I Lose Myself" sort en septembre 1998. Il précède la sortie du double album "The Singles 86 > 98", en octobre 1998. S'en suit une tournée européenne de 46 jours ( 32 concerts ), dont la première date est le 2 septembre 1998 au Song Fest Grounds de Tartu, Estonie, en passant par le Palais Omnisport de Bercy, Paris, le 7 octobre 1998, jusqu'au Velodromo de Anoeta de San Sebastian, Espagne, le 17 octobre 1998. Sur scène, deux musiciens seront présents aux côtés des trois artistes, Christian Eigner à la batterie et Peter Gordeno au clavier, et deux choristes.
